L'or d'un enfer vert
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© Jean-François COUBAU
- Debout ! . . . Accrochez ! . . . Go ! 
 
Deux par deux, les hommes du 2ème Régiment Étranger de Parachutistes, sautent des 8 C-160 Transall de l'Armée de l'Air. Dans la nuit froide, à 11 000 mètres, avec le masque à oxygène, il est difficile de voir quelque chose, au-dessus du Brésil. 
 
Les quelques minutes de descente semblent durer un temps infini. Enfin, les soldats d'élite de la France arrivent. Grâce à leurs GPS personnels, ils ont pu maîtriser leurs chutes et le regroupement dans la clairière est quasi-parfait. Sans un mot et avec professionnalisme, ils retirent leurs parachutes et le plient. Tous saisissent leurs armes et se rassemblent. Seulement vingt minutes sont passées depuis le saut. 
 
Dans la jungle sud-américaine, les bruits ne surprennent pas les Légionnaires. En vieux routiers de tous les stages organisés par l'armée française, ils connaissent bien la forêt amazonienne et ses dangers. 
 
Soudain, les fourrés s'écartent, et des hommes en treillis camouflés marchent vers eux. Rien ne donnait à penser qu'ils étaient cachés là. Les commandos de l'armée brésilienne s'avancent, un peu intimidés par ces soldats occidentaux, au prestige si grand. En effet, ce sont des éléments de deux compagnies de cette unité d'élite, la 3ème spécialisée dans l'assaut amphibie et la 4ème, qui est la compagnie de " sniping " et de démolition, qui se trouvent là. L'ensemble est dirigé par un commandant qui prend contact avec les rangers brésiliens. Grâce à un interprète, la conversation s'engage. 
 
- Bienvenue au Brésil, messieurs. Vous êtes arrivés à l'heure prévue. Toujours aussi efficace, la célèbre Légion ! 
 
- Merci ! répond le commandant Archanbaud, qui n'a guère le temps de se délecter du compliment. Nous avons encore je crois onze kilomètres de route. 
 
- Exact, mais une partie se fera par pirogue et le reste à pied. 
 
- Nous vous suivons. 
 
Rapidement, tout le monde prend place dans les embarcations et on descend le courant. Une heure plus tard, on débarque sur une petite plage. Sans un mot de trop, la colonne se met en marche. Dans la sylve, la marche est difficile car les branches enchevêtrées et le terrain glissant ralentissent l'allure, surtout de nuit. Mais les longues heures d'entraînement payent et la progression est soutenue. 
 
L'aube n'est pas encore levée que l'objectif est en vue. Maintenant, on parle par signe ou à voix très basse. Le commandante Edinho, qui est le chef des rangers brésiliens s'adresse à l'officier français. 
 
- Nous nous sommes occupés des guetteurs lointains. Venez voir. 
 
Faisant quelques pas, il emmène son interlocuteur vers une fosse où à la lueur de lampes voilées, on peut voir cinq corps immobiles. Les commandos brésiliens ont bien joué et la voie est libre. 
 
Silencieusement, les légionnaires entourent le camp des guérilleros. Munis de leurs lunettes à amplification de brillance, ils distinguent parfaitement les sentinelles. Il semble qu'elles soient moins d'une dizaine. L'aube a toujours été considérée comme le moment idéal à une attaque car c'est à ce moment-là que la vigilance est à son plus bas niveau. 
 
Par signe, le capitaine Archambaud place son dispositif. Lentement, le piège se met en place. Les tireurs de précisions vont avoir un grand rôle à jouer dans l'effet de surprise. Patiemment, ils choisissent leurs emplacements et se positionnent. Les télémètres laser TM-18 ", à grossissement x 6, mis à la disposition des chefs d'équipes " snipers donnent une excellente idée de l'azimut des cibles. 
 
Le commandant Archambaud, au bout d'un moment, sait que ses hommes sont en place. La guerre réseau-centrée qui montre sur les écrans de l'internet tactique la position de chacun, ami ou ennemi, donne à chaque échelon une vision de la situation, avec le maximum de détails. Lorsqu'il s'estime prêt, il donne l'ordre fatidique : 
 
- Feu ! 
 
Sans un bruit, grâce aux modérateurs de sons, les balles foncent dans la nuit et trouvent leurs buts. Touchées en pleine tête, les huit sentinelles s'effondrent sans bruit. Les rangers brésiliens bouclent les abords du camp pour empêcher les éventuelles évasions. 
 
- En avant ! 
 
Connaissant par cœur la topographie des lieux, car ils ont été bien " briefés ", les hommes s'élancent. Deux sections de la 3ème compagnie, foncent vers les dortoirs. Justement, la porte de l'un d'eux s'ouvre et un guérillero sort en baillant. Dans le petit matin blafard, il n'a que le temps de distinguer une ombre gigantesque devant lui. Il ouvre la bouche pour crier, mais le poignard du Légionnaire Hartmann s'enfonce dans sa gorge. Silencieusement, les groupes entrent dans les baraques. Les terroristes dorment ou se réveillent à peine. Sans transition, ils passent à un sommeil définitif. 
 
La troisième section se dirige vers les bungalows des chefs. Les portes sont défoncées et les soldats entrent en force. Tous les individus rencontrés, s'ils font mine de résister, sont abattus. Quelques-uns sont faits prisonniers. 
 
C'est par pure malchance qu'un cuisinier insomniaque sort de sa cuisine et voit l'attaque. Il prend une arme, vise les hommes devant lui et lâche une rafale sauvage qui part vers le ciel, car entre-temps, un des légionnaires l'a fauché d'une balle en plein cœur. 
 
Mais le bruit réveille définitivement le camp. Plus question de ruser maintenant. Une mitrailleuse se met à tirer, mais les légionnaires engagent l'action avec précision et méthode. Les grenades et le feu meurtrier des paras stoppent toute velléité de résistance. Les guérilleros tombent les uns après les autres. Quelques parachutistes sont blessés et rapidement pris en charge par les infirmiers. 
 
Des coups de feu éclatent aux abords du camp, ce sont des terroristes qui ont essayé de s'échapper. Les rangers brésiliens ont développé des arguments convaincants pour les inviter à rester sur place . . . éternellement ! 
 
- À nous, dit le commandant Archambaud. 
 
Guidé par un brésilien, il se dirige vers une petite case. L'autochtone ouvre la porte et dirige la lumière vers le sol. Alors, là, l'officier voit. Tout le matériel d'orpaillage est ici. Grâce à ceci, les orpailleurs clandestins, non seulement pillent la forêt, à la frontière entre la France et le Brésil, mais encore détruisent le fragile équilibre écologique de la sylve. Les kilos de mercure, réactif de l'or, empoisonnent poissons et plantes. La survie de l'homme peut être remise en cause, si on laisse perdurer de pareils comportements. Depuis des années, l'ONU se bat contre ce fléau et aujourd'hui, seule une opération militaire conjointe des deux pays a pu avoir raison de ce qu'il faut bien appeler des terroristes écologiques. 
 
Maintenant, tout le monde a évacué le camp. Les hommes de la 4ème compagnie sont à l'œuvre. Méthodiquement, ils détruisent les installations.  
 
Les hélicoptères sanitaires arrivent enfin. Ils emmènent les blessés des deux camps, car même si on a affaire à des gens sans conscience, on se donne le droit de les traiter humainement, alors qu'eux n'hésiteraient pas à éliminer purement et simplement leurs adversaires. C'est tout l'honneur de la société occidentale à agir ainsi. 
 
Maintenant, les hommes des deux armées, soudés par cette fraternité issue d'une grande cause, volent vers la sécurité. Ils arrivent en Guyane et descendent sur le tarmac de l'héliport. Ils sont à peine au garde-à-vous qu'ils n'en croient pas leurs yeux. Le Secrétaire Général de l'ONU, Ban-ki-Moon est là devant eux qui leur dit : 
 
- Au nom de l'humanité, merci Messieurs !