L'été de mes quatorze ans, ma famille avait trouvé un endroit pas loin de notre maison pour passer un bon moment près d'un étang où nous pouvions nous baigner dans une eau, on va le dire, pas toujours propre. Mais bon...
Cette année-là, à côté de ce petit parc, se tenaient deux dresseurs avec des chevaux et des poneys. Ils proposaient des petites promenades à cheval aux gens à un prix raisonnable.
Tout le monde fut emballé. Surtout moi qui aimait monter les chevaux et qui rêvais de faire de l'équitation. Cela, mes parents le savaient et aimaient nous faire plaisir.
Nous avons fait cet été, plusieurs promenades à cheval. J'ai aimé caracoler sur le dos d'une belle jument Tornade, suivie de son poulain Cyclone qui ne la lâchait jamais. J'ai trouvé ça un peu haut au début et un peu bougeant mais on se laisse vite bercer et la promenade devient agréable.
J'ai de bons souvenirs de ces séances mais une en particulier a été franchement hilarante !
Ce jour-là, nous avons tous rencontré des petits soucis techniques et je pense que le dresseur ne nous oubliera pas.
D'abord, mon cousin, âgé de neuf ans alors, avait pour habitude de monter Apache, un beau poney caramel et imposant. Ce jour-là, il oublia de mettre son pied dans l'étrier. On le vit donc, pendant sa chevauchée se coucher sur le cheval et pencher dangereusement sur le côté. Fort heureusement, le dresseur à côté de lui le rétablit vite fait et mon cousin put terminer sa promenade.
Mon parrain, lui, un peu craintif accepta, poussé par sa femme, de monter sur Tornade, la belle jument couleur chocolat. Durant le parcours, pris sans doute d'une fringale, l'animal se fourra dans les buissons en oubliant son cavalier. Résultat, mon parrain resta quelques secondes en maugréant, coincé dans les fourrés. On n'était pas près de le revoir monter !
Le plus marrant fut quand même ma soeur, âgée aussi de neuf ans et son impétuosité naturelle. Elle montait Nénes, un poney paresseux. Pour le faire avancer plus vite, ce jour-là, le dresseur donna à l'enfant une petite badine et lui conseilla de taper gentiment sur l'animal pour le stimuler. Elle ne se le fit pas dire deux fois mais elle fouetta le poney un peu fort. Celui-ci s'emballa, mécontent d'un tel traitement et se mit à galoper en zigzag. Le dresseur, d'abord surpris par cet élan d'énergie soudain et inhabituel de la part du poney, les suivit en courant et manqua tomber plusieurs fois à chaque changement de direction, à cause de ses tongs qui glissaient sur le sable. La poursuite fut plutôt comique. D'un côté ma sœur, qui s'éclatait comme une folle et continuait à manier la badine sur le dos de la pauvre bête et de l'autre, le malheureux lad qui dérapait lamentablement à tous les virages ! Il fallait le voir pour le croire. À raconter, ce n'est rien !
Quand au bout d'une course effrénée, le dresseur réussit à les rattraper on ne sait comment, il revint en tenant fermement les rênes du poney. La fillette était toute excitée. Pour elle, ça avait été un bon moment de sensations fortes ! Le lad, lui, ne devait pas être de cet avis. Il était essoufflé et en sueur et boitait légèrement. Visiblement, son commerce devenait un métier dangereux !
Ces quelques inconvénients du direct si l'on peut dire, nous font encore bien rire aujourd'hui et autant que je m'en souvienne, je n'ai jamais revu mon parrain sur un cheval. Se manger les buissons a dû lui rester en travers de l'estomac !