Les OVNI, ça n'existe pas
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© Jean-François COUBAU
- Non, non et non ! 
 
Et d’un geste rageur, le petit homme à barbichette blanche abattit son poing sur la table. Et de répéter : 
 
- Non, non et non, les OVNI, ça n’existe pas. 
 
Derechef, il tapa du poing sur la table. Malencontreusement, celui-ci rencontra le bord du classeur et il grimaça de douleur en se tenant la main. Devant lui, les étudiants hilares se demandaient quand cesserait cette « comédie ». 
 
C’est que la chose était très sérieuse ! Le professeur Amaïbégu, titulaire de la chaire de physique des solides liquides et des gaz solidifiés tenait une conférence à l’Institut des Sciences Exactes et Inébranlables, sur l’existence des OVNI. Surtout pour démontrer que ceux-ci n’existaient pas. À ses côtés, son assistante, mademoiselle Mifancaga hocha gravement de la tête. Et le cuistre de reprendre : 
 
- Les OVNI n’existent pas. D’abord, il n’y a personne sur les planètes de notre système solaire. Il n’y a pas d’air, pas d’eau, donc pas de vie possible. C’est dit, c’est démontré et dé-fi-ni-ve-ment acquis. Je sais de quoi je parle, car je suis un savant, MOI ! Des inventions le prouvent. 
 
Au premier rang, une jeune femme répondant au doux prénom de Perle-Anne, lui demanda : 
 
- Mais qu’avez-vous donc inventé, monsieur Amaïbégu ? 
 
- Hum, professeur Amaïbégu, ne vous en déplaise ! J’ai inventé l’eau en poudre. 20 grammes d’eau en poudre, agrémenté de 980 millilitres d’eau, font un litre d’eau claire et buvable ! 
 
Aussitôt, ce fut un tonnerre de rires dans l’assemblée des étudiants ! 
 
- C’est tout ? demanda Marie, jolie brunette du premier rang. 
 
- Non, j’ai aussi inventé le papier hygiénique antidérapant ! 
 
Et les rires reprirent de plus belle. Lorsqu’ils furent retombés, une jolie étudiante prénommée Marlène, aux magnifiques yeux d’océan leva la main et prit la parole. 
 
- Professeur, vous ne voyez que le système solaire, alors que la galaxie doit être considérée dans son ensemble. Malgré l’équation Einsteinienne qui stipule que la vitesse de la lumière est une limite, on n’a pas démontré qu’elle était infranchissable comme ont pu l‘être dans le passé le mur du son ou le mur de la chaleur. Ces barrières ont été franchies. Dès lors, il semblerait qu’une civilisation en avance technique sur la nôtre pourrait le faire et donc rien n’interdirait de penser que des extraterrestres pourraient venir du centre de la galaxie. 
 
Malgré cette pertinente intervention, la « savantasse » secoua la tête et bégaya : 
 
- Mais . . . mais . . . mais  
 
Une main se leva. Elle appartenait à une jolie demoiselle, prénommée Maddy. 
 
- Mais professeur, il y a plus de cinq-cents exo planètes répertoriés à ce jour, sans compter les planètes sans étoiles, qui errent dans le cosmos. Au vu de ces dernières découvertes, l’équation de Drake, qui pose tous les critères de possibilités de vie dans l’Univers ne peut qu’avoir un résultat supérieur à 1, qui serait le nombre de vies possibles dans l’espace, au moins galactique. Scientifiquement, il est donc presque certain que la Vie existe ailleurs. 
 
Le « savant » irrité par ces remarques pertinentes, ne savait que répondre. Un étudiant à la carrure d’athlète, prénommé Jean-Jacques demanda la parole et l’obtint : 
 
- Parlons clair, professeur, car je suis quelqu’un de concret. Les observations répétées d’OVNI, si elles ne donnent pas d’indication quant à leurs origines, nous démontrent que ces engins sont dirigés de manière intelligente. Je n’en veux pour preuve que l’affaire iranienne de 1976, où un avion de chasse de l’armée de l’air de ce pays a tenté d’intercepter un OVNI dans le ciel de Téhéran. Il a enclenché ses armes de bord, mais à quarante kilomètres de distance, les systèmes de tir et la radio ont été neutralisés, sans que le pilote ne puisse rien faire. Manifestement, l’objet inconnu a compris qu’il était attaqué. Il a réagi d’une manière non reproductible par notre technologie, qui était dépassée par plus forte qu’elle. Il a même lancé un mimi-ovni qui a pris en chasse l’avion, lequel n’a dû son salut qu’à la fuite. Alors, je vous pose la question professeur. Que pensez-vous de ce cas concret ? 
 
Un abominable bégaiement sorti de la bouche du pédant. Il venait de perdre ses derniers moyens, qui avouons-le, n’étaient que peu développé ! 
 
- Mais, mais c’est faux, c’est tout faux. C’est du mensonge, je . . . 
 
Une clameur d’incrédulité lui répondit. Une étudiante prénommée Corynn se leva et hors d’elle lança : 
 
- Non, vous ne vous en tirerez pas comme ça ! Le cas cité par mon collègue est réel. Le problème, c’est que vous niez l’évidence parce-que c’est plus confortable. Cela vous permet de ne pas vous remettre en question et ne pas chercher la vérité, qui est synonyme d’effort que vous ne voulez plus effectuer. Une éventuelle remise en question de notre univers, qu’il soit physique ou psychologique vous fait peur, car vous seriez incapable de la comprendre. Il n’y a que la Vérité qui fait peur, c’est pourquoi vous préférez vivre dans le mensonge ! 
 
Un immense applaudissement éclata. Presque immédiatement, il s’arrêta car tous venaient d’apercevoir une soucoupe volante se poser dans la cour de l’université. Aussitôt, une trappe s’ouvrit et plusieurs créatures de petite taille s’avancèrent. Le temps de réaliser, une porte-fenêtre s’ouvrit comme par magie et les nains entrèrent. Ils mesuraient environ un mètre de haut, avaient une peau verte, recouverte par une espèce d’uniforme gris. Malgré la peur que lui inspiraient ces êtres de cauchemar, le professeur Amaïbégu s’avança, déglutit et lança : 
 
- Qui qui quiquiqui eeeeeeetes-vvvvvvvooouuuuuus ? 
 
Une des créatures remua les lèvres : 
 
- Karo mada Butona Pato Tamana ! 
 
- Comment ? 
 
- Yo Ta toubamu kika tomitero ! 
 
- Que dites-vous ? 
 
La créature manipula un bouton sur sa ceinture et dit : 
 
- Excusez-moi, j’avais oublié de brancher le traducteur universel. 
 
- Qui êtes-vous ? répéta Amaïbégu. 
 
- Nous sommes des Zondiens. 
 
- Des Indiens ? 
 
- Non, des Zondiens. Nous venons de Zond, troisième planète à gauche après le rond-point d’Aldébaran. Je me nomme Klaak ! 
 
- Claque ? 
 
- Non, Klaak, tête à claques ! 
 
- Oh ! Qu’êtes-vous venus faire ici ? 
 
- Clouer votre bec de petite savantasse ! 
 
- Je ne vous permets pas . . . 
 
Silence. Nous avons entendu votre intervention depuis Zond, tellement vous criez fort ! Vous n’avez pas honte d’induire tous ces jeunes gens en erreur ? Si vous étiez payés à votre vrai niveau d’intelligence, vous seriez clochard ! 
 
- Mais, mais . . . 
 
- Et d’abord, vous buvez ! 
 
- Quoi ? 
 
- Oui, vous êtes un ivrogne ! Tenez, regardez ! 
 
D’un geste vif, le petit être tendit la main. Aussitôt, la porte d’une armoire s’ouvrit et plusieurs étagères garnies de bouteilles de whisky furent visibles. 
 
Immédiatement, les rires se firent entendre. Sur ce, l’extraterrestre ajouta : 
 
- Et vous trompez votre femme avec Mlle Mifancaga ! 
 
- Quoi ? C’est faux et je . . . 
 
- Taisez-vous, voici la preuve. 
 
Aussitôt, par télékinésie, une des bouteilles d’alcool se déplaça. Derrière, se mit à voleter, suspendues à la volonté de la créature, des boites de préservatifs ! 
 
Klaak examina la boite et lança en ricanant : 
 
- Et en plus, vous prenez la taille XXL ! C’est comme si un enfant de cinq ans mettaient les bottes de son père ! 
 
Et les rires de se faire entendre de nouveau ! Et le « professeur » de lancer : 
 
- Assez, Klaak ! 
 
- Professeur Klaak ! Tenez voici les plans qui vous permettront de construire un astronef à moteur supraluminique. Chez nous, on les trouve dans les boutiques de jouets. 
 
Tremblant, Amaïbégu prit le papier et loucha dessus. 
 
- Je n’y comprends rien, finit-il par lâcher. 
 
- Ça ne m’étonne pas, vous n’êtes qu’un sombre crétin. 
 
Se tournant vers un étudiant répondant au prénom de Serge Edmond, Klaak lui tendit le papier. Le jeune homme le regarda attentivement et déclara : 
 
- C’est complexe, mais les systèmes décrits sont assez compréhensibles. Avec du temps, on devrait maîtriser la solution. 
 
- Voilà, répondit Klaak. Vous, la savantasse, déguerpissez, vous n’êtes qu’un ignoble personnage. 
 
Sous le coup de la diatribe, Amaïbégu ne sut que répondre. Il tenta de frapper l’extraterrestre, mais ne réussit qu’à se décocher un formidable coup de poing dans la figure. Sous le choc, le dentier voltigea, chuta par terre et se brisa.  
 
- Alors, Amaïbégu, est-ce une réponse intelligente ? Et ça se dit « savant » ? 
 
- Oh, assez, je . . . 
 
- Je quoi ? Ça fait des années qu’on supporte tes péroraisons sur notre inexistence. Alors, on a décidé de te punir. 
 
Maintenant tremblant de peur, le savant couina : 
 
- Qu’allez-vous donc me faire ? 
 
- T’emmener avec nous. Sur Zond, tu seras soumis à notre châtiment suprême ! 
 
- Quoi donc ? La prison ? 
 
- Non, pire ! 
 
- La torture ? 
 
- Non, pire ! 
 
- Le bagne ? 
 
- Non, pire ! 
 
- La mort ? 
 
- Non, pire. 
 
- Mais quoi alors ? cria presque Amaïbégu. 
 
- Tu ne devines pas ? 
 
- Non. 
 
-Alors, je vais te le dire. Tu devras développer ton intelligence et ta compréhension de l’Univers en entrant en contact avec tous les peuples du Cosmos. Ce n’est pas gagné ! 
 
- Oh . . . . 
 
Immédiatement, les quatre extraterrestres saisirent Amaïbégu et le traînèrent à la soucoupe malgré ses protestations. Et c’est Jean-Jacques qui eut le mot de la fin en lui criant : 
 
- Professeur, ne paniquez pas, dites-leur simplement qu’ils n’existent pas ! 
 
Et les rires de retentir !